Thiers

Adolphe Thiers, né à Marseille en 1797, mort dans son lit à Saint Germain en Laye 80 ans plus tard, ne fut pas seulement le gentil organisateur de la « semaine sanglante » qui, du 22 au 28 mai 1871, mit un terme violent à la Commune de Paris. Il fut aussi, trente ans durant, sous le pseudonyme de Germaine Hopauze, l’attraction principale du cabaret transformiste germanopratin Chez Zézette où, tous les soirs (relâche le mercredi en matinée) il reprenait les plus grands succès du pétomane Gigot. Le tout Paris mondain se pressait pour applaudir les prestations du futur académicien et la légende prétend qu’une bonne demi-douzaine de princes russes se seraient suicidés après avoir été éconduit par la diva du prout. Vraie ou fausse cette anecdote ne cesse de tarabuster les historiens les plus pinailleurs qui ne parviennent pas à comprendre comment un gros type velu de plus d’un mètre soixante-dix-huit de haut, avec des bras comme mes cuisses et une paire de rouflaquettes qui était, dit-on, aux Jackson Five ce que les Jackson Five sont à Kojak, le tout moulé dans une robe fourreau en paillettes mauves et émettant en continu un volume de gaz intestinaux équivalent à la production annuelle d’un troupeau de charolaises engraissées au cassoulet toulousain, comment un gros type pareil, donc, avait pu taper dans l’œil d’un prince russe même méchamment sur-imbibé de vodka. Pourtant la rumeur à la vie dure et de nos jours encore il se trouve dans les allées du Père-Lachaise d’infâmes loqueteux qui, pour peu que vous leur glissiez une piécette au creux de leur paume crasseuse se font un plaisir de vous narrer tout l’histoire par le menu avec un luxe de détails graveleux qui ferait rougir le plus débauché des libertins.